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Danseuse en paille

lundi 25 juillet 2022

L’expression m’est venue en mettant à jour mon profil Linkedin. Ça n’amuse sans doute que moi, mais je trouve ça drôle, l’occasion.

Une danseuse en paille, c’est comme une danseuse en herbe. La seule différence est que l’herbe pousse quand la paille sèche. À part ça, c’est tout pareil…

La danseuse en paille a l’apogée et le périgée de sa danse devant elle. Comme la danseuse en herbe elle est pressée d’atteindre le premier et s’emploie à éloigner le second, sans doute un peu plus que sa cadette. Leurs élans les rapprochent. L’une comme l’autre veulent "danser !". Mais elles dansent déjà direz vous… La ponctuation dit la différence. Ce n’est pas un passe-temps mais un impératif, une urgence. C’est aussi « plus » : plus rapide, plus ralentie, plus précise, plus nette, plus dense, plus fluide, plus personnelle, plus intense, plus en lien, plus en corps, être espace… Espoirs embrassés.

Elles se croisent, se saluent, se reconnaissent
Peut-être ?
Travaillent, s’enivrent, se blessent,
Se relèvent,
Trop tôt
Car l’urgence…
Est un sentiment
Ardent.
Exigeant, diraient ceux qui n’ont nulle hâte de vivre, détesteurs de passions, gestionnaires de raison, home stagers d’existences…

La danse est là, palpitante dans un geste, un regard, vibrante et fulgurante, dans l’élan, le contact, puissante dans le groupe, débordant des entrailles. Elle nous porte, nous tire, nous secoue dans la vague, nous laisse respirer, au rythme du ressac. On l’attend, on l’appelle, on l’habite déjà. Elle nous susurre à l’oreille, colporteuse de possibles d’envies voyageuses corps à corps indépendantes d’esprit. Étrange inspiratrice qui n’existe qu’à travers un mot que l’on décide de poser sur nos actes.

Je préfère la poésie au costume spectral de conscience académique. Seuls les gardiens des ors qualifient d’ignorance la sagesse qui menace. Leur exclusivité c’est l’ordre, les privilèges. Le savoir est à toutes et j’aime la proposition qui veut qu’en écriture, la poésie soit « quand ça revient à ligne ». En danse ce pourrait être « quand l’espace revient au temps ». Danser serait les faire, se lier l’un et l’autre, repliés, dépliés, d’un agir singulier et sensible.

Pour cela il faut plus, tant l’action se dérobe. Dès demain car déjà les impulses me titillent, ma peau réclame l’air, chaque cellule veut sa part de gravité joyeuse, contrariée d’une manière qui reste à inventer.