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Indécrottable binarisme

jeudi 12 avril 2012

À travers une enquête pleine de « bonnes » intentions, l’Union Européenne se fend d’un questionnaire sur les conditions de vie des personnes LGBT. Je n’en voudrai pas à l’institution d’utiliser des formules alambiquées pour circonscrire la population des personnes invitées à répondre. Les termes utilisés couramment ont un sens différent d’un pays à l’autre, d’une association à l’autre, d’une personne à l’autre.

Lorsqu’au début du questionnaire, les personnes sont invitées à se définir elles-mêmes, le choix proposé est non seulement étendu mais ouvert :

  • Transgenre
  • Transsexuel(le)
  • Femme avec un passé de transsexuel(le)
  • Homme avec un passé de transsexuel(le)
  • Intergenre
  • Travesti(e)
  • Queer
  • Autre forme de transidentité, veuillez préciser :

Une fois n’est pas coutume, on croirait avoir échappé au sacro-saint binarisme. Mais il faut croire que l’équipe ayant conçu le questionnaire avait épuisé là son potentiel d’autonomisation par rapport à l’hétéropatriarcat dont le binarisme est la clé de voûte idéologique.

Sitôt le sujet des sexualités abordé, 5 questions plus loin, le binarisme revient en force. Il ne reste rien des identités évoquées au début. À la question "Avec qui fait-on du sexe", les réponses proposées sont éloquentes :

  • Uniquement des femmes (ou avec une seule femme)
  • Principalement des femmes
  • Aussi bien des femmes que des hommes
  • Principalement des hommes
  • Uniquement des hommes (ou avec un seul homme)
  • Personne
  • Ne sait pas

Autrement dit parmi, des 7 et plus (choix libre) catégories envisagées au début, seules 2 sont, au mieux, nommées. Toutes les autres se voient regroupées dans la case "Personne", ce qui, en matière de défense des droits des identités non conformes est un tour de force. Dans tous les systèmes d’oppression, les dominant⋅e⋅s s’emploient à nier l’existence des opprimé⋅e⋅s puisque c’est un moyen efficace de les anéantir individuellement et, quand cela n’a pas marché, d’opposer une fin de non recevoir leur exigence individuelle et collective pour une existence digne.

La soupe à peine servie, on voit resurgir le fond de sauce idéologique cuisiné par cette institution et complaisamment servi par ses sous-traitants aussi bien que les « zassossiassions » dépendant de leurs subsides ou les quémandant.

Il est cocasse de constater que le même type de cerveau fossilisé a présidé aussi bien à la conception qu’à la réalisation du questionnaire. Qui se ressemble s’assemble... En matière de diversité, l’internaute souhaitant répondre à ce questionnaire en ligne est libre du choix de son navigateur Web, à condition de choisir Micro$oft Internet Explorer ;) Il serait malhonnête de feindre la surprise. On sait déjà que l’on peut autant compter sur l’UE pour faire valoir les droits des personnes TLBG que pour imposer les logiciels libres dans les marchés qu’elle contrôle intégralement.