La Breva et Limbo

La Breva

Dafne Bianchi et Anaïs Mauri forment un duo empli d’une puissante délicatesse qui nous entraîne dans leurs souvenirs et leur joie d’être sœurs ; deux artistes aux parcours et esthétiques différentes mais qui partagent une sensibilité à fleur de peau. Loin des cases dans lesquelles il serait aussi facile qu’absurde de les enfermer, elles se saisissent avec bonheur d’une forme de danse-théâtre qui sert tant l’écriture que la relation qu’elles souhaitent établir avec le public.

La bande sonore est presque intégralement réalisée à partir du son extrait de vieilles cassettes VHS et de sons d’ambiance recueillis durant le travail de recherche. Une exception majeure est la lecture d’un texte original qui semble porté par le vent, répondre aux cris et aux rires d’enfantes… Le travail du son est époustouflant ! Le son prend la forme de l’évidence d’un souvenir en émergence, lorsque encore plusieurs strates de temps s’entremêlent avant que le souvenir n’apparaisse, passant la main la danse qui, partant de ce souvenir, convoque des images, des sentiments, ce qu’il évoque à son tour.

Limbo

Limbo nous fait entrer dans un monde torturé duquel la fête (on pourrait dire "la fête à tout prix") serait une expression. L’artiste construit une danse contenue dans sa kinésphère, comme une expérience intime qui se heurte inlassablement à ses limites. Aucun mouvement n’ouvre sur l’espace au-delà, ne parvient à s’y connecter. La bande son fait largement appel à des musiques considérées comme festives par lesquelles Suzanne Degennaro a été attirée vers la danse. Le rapport à l’espace physique du plateau (déplacements, occupations) s’inspire de la vue subjective dans les jeux vidéos où l’on navigue dans des espaces vides. Elle revendique la référence aux liminal spaces qui sont pour elle une figuration contemporaine des limbes (limbo), un entre deux aux frontières de l’enfer, d’où le personnage ne cesse de tenter de sortir avant d’être consumé par les flammes.