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Vous avez dit "travestie" ?

samedi 18 septembre 2004, par Flaz

Le terme de travestiE est flou et péjorativement connoté. Faut-il le préciser ? Le bannir ? Tout dépend de ce que l’on veut faire du mot. Attention à ne pas trop vouloir lui en faire dire...

Les inconvénients du mot sont proportionnels aux attentes que l’on nourrit en l’employant. Ainsi, entre transgenres, ça ne me dérange pas de me dire "travestie". Ce mot me sert juste à indiquer que je n’affirme pas être une femme dans un corps de mâle. Ce n’est pas très précis, mais ça donne quelques indications. Je ne nourris pas l’espoir de me définir en disant "je suis travestie". Vis à vis d’une personne pas du tout au fait des questions d’identité de genre, je n’utilise pas ce mot. Je préfère "transgenre", car c’est totalement incompréhensible. Or, je préfère que la personne se rende compte qu’elle ne peut pas comprendre sans s’interroger un minimum sur ces questions plutôt que de lui donner l’illusion qu’elle m’a compris.

Pour moi, le travail sur l’apparence est un moyen d’expression de ma personnalité. Je ne suis pas dans une démarche "d’authenticité" (par rapport à quoi ?) mais d’expression, de sincérité (au sens où c’est toujours moi qui parle, agit et réagit). D’ailleurs, je trouve le "costume" féminin aussi contraignant que le "costume" masculin. Mais il me permet de rendre vivante, aux yeux des autres (et donc aux miens, aussi), une partie de moi que je sens étouffée dans ma manière de porter le costume d’homme. Ce qui me pèse vraiment, c’est d’être obligée de revendiquer un genre particulier et donc d’endosser un costume particulier. Mon sexe ne me gêne pas, c’est le genre qu’on lui colle qui m’enquiquine.

Pour revenir à la terminologie, il est manifeste que je me travestis, au sens où j’utilise "des tenues ou des accessoires vestimentaires réservés en principe, par convention sociale, aux personnes du sexe opposé" (cf. le glossaire du STS). Et c’est manifestement ce décalage qui me fait emprunter ce moyen d’expression. Le terme semble donc approprié mais il est très loin de me décrire... Il ne dit pas grand chose de ce que j’exprime en me travestissant. La diversité des personnalités, des identités qui empruntent ce moyen d’expression montre bien que lorsqu’on a dit "cette personne se travestit", on n’a pas dit grand chose ;-) Dire d’une personne qu’elle est unE travestiE c’est simplement prendre acte du fait qu’elle pratique le travestissement. Cela ne dit rien de son identité ni de son parcours. Voilà pourquoi, il est vain d’attendre beaucoup du terme "travesti".

Je pense que l’erreur de fond est de considérer les "travestiEs" (ainsi définiEs) comme une catégorie pertinente pour comprendre et décrire le rapport des individus au genre ou au sexe. Et toute tentative de découper cette catégorie en sous-catégories participe de cette même erreur. On est donc confronté à un problème. Si l’on donne un sens précis au mot, on s’aperçoit qu’il renseigne, finalement, assez peu. Sans même évoquer les personnes intersexuées (pour lesquelles toute définition s’appuyant sur le sexe est problématique) , on est notamment démunies pour distinguer, parmi l’ensemble des personnes transgenres, celles qui pratiquent le travestissement sans revendiquer l’un des deux genres, voire aucun des deux genres. On imagine les difficultés qu’elles ont à être reconnuE pour ce qu’elles sont (donc à exister), dès lors qu’elles ne peuvent même pas être nomméEs.

La tentation est alors forte d’employer le terme travesti dans ce sens. N’est-ce pas ce que je fais lorsque je me déclare travestie ? Mais, d’une part, je ne l’emploie que dans des conditions où je présume qu’il sera entendu dans ce sens restrictif. D’autre part, je reste consciente des limites et des risques de cet emprunt. La principale limite est de vouloir décrire par un forme d’expression des personnes dont le principal point commun ne réside pas dans le travestissement mais dans leur posture vis-à-vis de l’identité de genre (avec pour corollaire d’exclure toute personne qui partagerait cette posture sans recourir à ce mode d’expression). Quant au risque, l’importation d’un terme péjorativement connoté expose inutilement aux a priori qu’il véhicule, y compris chez des personnes dont on pourrait penser que l’expérience personnelle conduirait à une plus grande ouverture d’esprit. Ainsi, je comprends que des trans se fassent établir un certificat médical pour éviter les ennuis et faire valoir leur droit à vivre publiquement dans leur identité de genre. Je comprends moins que des trans comptent sur ce certificat pour conjurer leurs craintes de passer pour une travestie... Il ne m’est jamais venu à l’idée de me faire établir un certificat médical, par peur qu’on ne me prenne pour une trans non-opérée en début de traitement hormonal ;-)) Et je trouve tout aussi scandaleux qu’une personne travestie voie sa liberté entravée ou sa tranquillité menacée, qu’elle s’affirme ou non transsexuelle.

Il reste donc un terme à inventer. En s’inspirant de certaines pratiques de communication de mouvements L-G-B-T, on pourrait jouer la provocation, renverser la connotation négative en l’exagérant. Je succombe à ce penchant, lorsque, au cours de discussion approfondie, je finis par me définir moi-même comme une "créature". Une manière percutante d’exprimer (entre autres) que, dans notre société, une personne qui ne revendique aucun des deux genres (quel que soit son sexe de naissance !), est, plus que toute autre, considérée comme à la marge de l’espèce.

Messages

  • D’abord une remarque... TRAVESTI est un mot masculin, désignant un homme qui s’habille en femme (souvent pour ses activités sexuelles), pourquoi lui accoler un E ? Pourquoi le conjuguer au féminin ? Pour adoucir le trauma d’un homme qui s’habille en femme pour ses sauteries ?? Ou pour mieux faire passer la pillule d’un homme habillé en femme aux manières d’homme ???

    Pour ma part, je hais le mot transgenre, gros fourre tout (désolée, Mrs les travestis) désignant tout ce qui n’est pas dans la norme... Or, sur cette planète, il n’existe que des des êtres femelles et mâles, hormis les caprices de la nature ou ses erreurs !
    Donc les transgenres, allez vous rhabiller ou faire les choux gras des émissions de téèfun ou aime6 !!!
    Soyez, ou femmes, ou hommes et ne laissez pas la manie de fabriquer des petites cases pour y mettre les choses vous envahir....

    Charlène.

    • Vous êtes bien attaché, enchaîné même, à ce qui, à vos yeux devrait être masculin ou féminin ;-)) Vous devez avoir grand besoin d’être rassuré.

      A jouer les naturalistes vous auriez du remarquer que l’espèce humaine est composée de mâles et de femelles et d’un nombre significatif de personnes dont le sexe n’est pas clairement déterminé... et non pas d’hommes et de femmes. Mais on ne va pas vous en vouloir, ça ne fait qu’un demi-siècle qu’on a conceptualisé la chose ;-) En confondant les deux, vous vous interdisiez de penser leur autonomie aussi bien que leurs limites.

      Quant aux petites boîtes, en manipuler plus de deux met manifestement votre dextérité à rude épreuve. D’où votre haine pour ce qui vous échappe. On comprend mais ne compatit pas ;-)

    • Le monde est ainsi fait : plus les gens sont intellectuellement et culturellement limités, plus ils ont besoin de tout cataloguer, comme si cela pouvait les rassurer face à leur inexistence. On trouvait cette tare très banale lors des procès en sorcellerie ou en hérésie, certaines gens n’ont pas encore évolué depuis la Nuit de ces Temps révolus. Témoin le lascar qui signe Charlène (on appréciera le hiatus) et qui se rassure à bon compte en se roulant dans son pipi, qui ne craint pas d’en rajouter comme si on n’avait pas compris tout de suite, et hop ! encore une louche. C’est comique au second degré mais si dérisoire !

      De même qu’il n’y a pas des homos ou des hétéros en deux classes disjointes, il y a toutes sortes de pratiques intermédiaires que la Sainte Inquisition vouait au bûcher, que les blaireaux vilipendent, mais quand on voit "officier" ces gugusses on n’a vraiment pas envie de leur ressembler.

      Dans la mouvance TG (transgenre) il y a de tout, le seul point commun étant une transgression des codes sociaux. George Sand mettait des pantalons et fumait la pipe, elle était TG... idem l’abbé de Choisy, le Chevalier d’Eon ou notre cher roi Henri III qui aimait se travelotter pour festoyer avec ses mignons. Idem Jeanne d’Arc, qui portait l’habit masculin pour monter à cheval, porter l’armure et guerroyer, puis plus tard dans sa prison de Rouen pour tenter de résister aux geôliers qui la violaient quand elle était en fille, ce qui la fit condamner comme relapse.

      Le soumis qui se fait fouetter en bas et porte-jarretelles est TG le temps d’une soirée, le camionneur qui porte de la lingerie sous son bleu est TG, les travs siliconés qui tapinent le soir derrière mon lycée sont TG, les artistes de Michou aussi, le temps du spectacle, et moi et moi et moi..? TG avant les hormones je suis toujours TG et je le resterai après opération. Que de différences, n’est-ce pas ?

      Comme il est imbécile de dire telle personne mâle ou femelle et prétendre la condamner ad vitam aeternam à le rester, alors qu’il y a tant de mâles qui sont des lavettes minables et tant de femmes bien plus viriles que ceux qui se croient des hommes parce qu’ils ont un pendentif subabdominal qui leur sert de cerveau.

      L’ai-je bien descendu ? © Viviane* 13 février 2005

      Voir en ligne : http://soyeuse.free.fr

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